Abbeville
Historique et description
Attestée pour la première fois en 831, en tant qu’Abbatis-Villa, dans une chronique de l’abbaye Saint-Ricquier, Abbeville est cédée en 987 par Hughes Capet à son beau-fils, Hughes comte de Montreuil. Ce dernier fonde la lignée des comtes de Ponthieu et construit la première enceinte de la ville en 990. Cette première enceinte comporte des murailles, des fossés et un château comtal près de la porte Saint-Gilles. La protection est en partie assurée par la Somme. Cette première enceinte est remplacée entre 1185 et 1200 par une autre construite par les autorités communales franchisées en 1184. Elle inclut les faubourgs de Saint-Gilles, de Bois, de Saint-Jacques, de Saint-Jean-des-Prés et de Bourg du Vimieu. Très vite insuffisante, elle est remplacée à son tour par la troisième enceinte dont le périmètre est encore élargi, entre 1200 et 1210. Cette troisième enceinte comporte des tours rondes et des murs crénelés, ainsi que quatre portes : Saint-Gilles, du Bois, de Saint-Jean-des-Prés et du Bourg de Vimieu. Le château comtal est remplacé par un nouvel édifice en 1279, bâti sur ordre d’Edouard Ier d’Angleterre. Trois ans plus tard, une modification de tracé de l’enceinte inclut le château neuf dans les remparts urbains. Entre 1280 et 1477, Abbeville change plusieurs fois de souverains durant la Guerre de Cent Ans et durant les guerres entre Louis XI de France et le duc bourguignon Charles le Téméraire. C’est au cours du XVe siècle, durant les guerres en question que les fortifications ponthoises sont adaptées pour la première fois à l’artillerie par le renforcement des murailles. En 1471, Charles le Téméraire construit un second château, différent du premier, pour surveiller la ville. Ce second château disparaît en 1591 pendant les guerres de religion. En 1505, le premier château est transformé en prison. Sous Louis XI, une quatrième enceinte est bâtie avec la fermeture de la trouée entre les portes Saint-Gilles et Saint-Jean-des-Prés, défendue jusque là par le terrain marécageux. Sur la Somme, la défense est assurée par des herses sous les ponts et des chaînes tendues à travers le fleuve.
François Ier poursuit le programme de renforcement de l’enceinte commencé par Louis XI mais c’est son fils Henri II qui fait bâtir les premiers ouvrages modernes. Le bastion de Longueville, appelé aussi des Quatre Coins, est édifié sous son règne entre 1551 et 1559. Le maréchal de Retz ajoute une demi-lune et la courtine de Mail en 1585, à l’initiative de Charles IX. Entre 1596 et 1600, Henri IV fait bâtir les boulevards des portes de Saint-Gilles, Macardé et Bois. La porte de Macardé est avancée et refaite à la moderne tandis que les autres fortifications sont consolidées une nouvelle fois. Deux bastions sont édifiés sous son règne (Saint-Paul et Rambures), tandis que celui de Longueville est modifié. Ces chantiers sont inachevés à sa mort en 1610. Le cardinal de Richelieu, premier ministre de Louis XIII, visite le site le 29 octobre 1636 et ordonne la construction de contrescarpes, de glacis et d’une demi-lune entre les portes de Saint-Gilles et Bois. Les chantiers d’Henri IV sont terminés à l’époque et deux bastions supplémentaires (ceux du Château et de Macardé) sont édifiés à l’époque. Une autre demi-lune est bâtie devant la port de Bois (celle de Noyers) et un ouvrage à corne, dit Champ de Mars, complète les défenses au nord. Toutefois, le recul progressif de la frontière avec les Pays-Bas à partir de 1635 et jusqu’en 1697 rétrograde progressivement Abbeville de la première à la troisième voire à la quatrième ligne de défense. Cette situation va conduire à un certain abandon de la place.
Dans un rapport daté de 1688, Vauban nous déclare que les fortifications d’Abbeville sont en ruines et que la ville ne possède pas d’écluse défensive. Pour améliorer les défenses, il ajoute un ouvrage à couronne doté de deux demi-lunes et d’un réduit au nord, édifie des souterrains sur la partie est de l’enceinte, fait planter des ormes pour stabiliser les talus entre les portes Saint-Gilles et de Bois et installe un système d’inondations défensives. Pour le reste, il fait restaurer les ouvrages dégradés et préconise d’installer un important contingent de cavalerie dans la place pour renforcer la garnison. Cette dernière suggestion s’appuie sur l’abondance de prairies fourragères dans la région, lesquelles permettront de nourrir les chevaux.
Le XVIIIe siècle ne modifie pas les fortifications d’Abbeville. Les seuls ouvrages neufs sont un corps de garde situé rue des Capucins et une grande caserne avec écuries près de la porte Saint-Gilles (édifiés en 1780). Un rapport du Génie français de la Première République daté de 1793, mentionne que les fortifications sont en ruines et qu’une souscription populaire doublée d’une conscription sont nécessaires pour leur remise en état. Cette remise en état se déroule entre 1794 et 1812, période durant laquelle est construite la contregarde du bastion de Rambure. De 1812 à 1814, la porte de Rambure est refaite à la moderne. Sous la Restauration, le rempart médiéval entre la porte Macardé et la rivière Scardon, affluent de la Somme, est remplacé par un rempart de terre. En 1831-34, la Monarchie de Juillet édifie un bastion gazonné près de la tour médiévale des Hauts-Prés. Napoléon III déclasse Abbeville en 1867, déclassement suivi par les premières démolitions en 1869. La guerre franco-prussienne de 1870-1871 et la chute du Second Empire interrompent ces démolitions et conduisent au réarmement de la place par ses habitants qui édifient des palissades devant les faubourgs jusqu’au 28 janvier 1871 et la capitulation française. Les Prussiens démolissent aussitôt ces défenses provisoires. En 1872, la Troisième République déclasse définitivement Abbeville qui est démolie en plusieurs phases, chantier terminé définitivement en 1906.
État actuel
Il ne subsiste plus grand-chose des remparts d’Abbeville : les casernes et le corps de garde de 1780 (classé monuments historiques et restaurés en 1995), les restes du bastion de Longueville et une tour médiévale. Des circuits de visite permettent de les retracer, sur renseignements à l’office de tourisme local.
Abbeville
Abbeville
50° 6' 10.4854" N, 1° 49' 48.0295" E
- BRAGARD (P.), CHEUVA (P.), COMBEAU (Y.) et al., Etoiles de pierre. Voyage en Nord Pas-de-Calais, Villeneuve-d’Ascq, 2003.
- DEVISNES (G), Histoire d’Abbeville et de sa région, des origines à l’aube du XXIe siècle, Paris, 2004.
- LOUANDRE (F.-C.), Histoire ancienne et moderne d’Abbeville et de son arrondissement, Abbeville, 1834.