Longwy
Le premier château et l’enceinte
L’agglomération de Longwy apparaît au Moyen Âge. Dotée d’un site castral vers le XIe siècle, le village originel s’est développé sur un plateau allongé et a fini par rejoindre la vallée de la Chiers, divisé en deux villes : Longwy-Haut, le Vieux Longwy fortifié, et Longwy-Bas, dans le vallon de la rivière. Une enceinte médiévale entoure le bourg de Longwy-Haut en 1365 tandis que Longwy-Bas n’est pas été fortifié. Au XVe siècle, le château de Longwy est l’un des plus importants de la région. La ville subit d’importantes dévastations lors de la guerre de Trente ans. Au XVIIe siècle, elle compte 1600 habitants. La prise de Longwy en 1635, sa capitulation devant le marquis de Senneterre en 1646, et l’occupation française jusqu’en 1660 préfigure son rattachement à la France qui sera effectif en 1670.
Le premier projet de Thomas de Choisy
En 1679, après la paix de Nimègue, Louis XIV décide de faire de Longwy une place de guerre en face de Luxembourg qui n’est qu’à cinq lieues. L’ingénieur Thomas de Choisy, collaborateur de Vauban, est envoyé sur place par Louvois, ministre de la Guerre. Proche de la forteresse de Luxembourg, tenue par les Espagnols, et des frontières du Saint-Empire, le site de Longwy est jugé idéal par Choisy pour la construction d’une place forte. Il propose de créer une ville neuve fortifiée sur un plateau situé 800 mètres plus haut au-dessus de l’ancien château, au nord, qui permet d’utiliser un relief à l’est comme barrière naturelle. Le premier projet de Thomas de Choisy consiste en une ville carrée ou pentagonale.
Le second projet de Thomas de Choisy modifié par Vauban
Après la signature du traité de Nimègue en 1679, il élabore un deuxième projet : celui d’une ville neuve hexagonale, dotée de six bastions creux à orillons, cinq demi-lunes et un ouvrage à corne. Cinq courtines sont protégées par des tenailles, sauf celle du front sud-est à-pic, dont les flancs des bastions sont droits avec des braies. Le chemin couvert possède une contrescarpe et des places d’armes. Deux portes, dites de Bourgogne et de France, percent cette enceinte, réparties symétriquement au nord et au sud. Vauban s’oppose à ce projet et en propose un autre que Louis XIV refuse. Obéissant au roi, Vauban applique donc le projet de Thomas de Choisy en le modifiant légèrement. Ces travaux de construction de la place commencent le 10 aoűt 1679. La destruction totale du château, inutile, fut entreprise en 1682, après le relogement de ses habitants. Les deux fronts occidentaux possèdent des tenailles et un troisième, au sud, est équipé d’une braie. Le chemin-couvert est équipé de traverses. A l’intérieur, la ville neuve est édifiée selon une trame orthogonale avec une place d’armes centrale, dotée d’un puits à l’épreuve. Les neuf casernes et les sept pavillons d’officiers sont groupés dans les îlots rectangulaires les plus proches des courtines ; l’hôtel du Gouverneur et l’église se situent au centre, le long de la place d’armes. On y édifie également un arsenal, une boulangerie militaire et un puits de siège. 3 600 militaires sont en garnison à Longwy. La place est composée d’une trentaine d’îlots réservés aux habitations civiles sur environ 12 hectares. Après le traité de Rijswick de 1697 et la restitution de Luxembourg aux Pays-Bas espagnols, Vauban dépose un mémoire pour achever la place et un projet d’agrandissement destiné à faire de Longwy une place aussi étendue que Luxembourg et dotée d’une garnison aussi importante. Pour cela, il propose de refortifier le site du Vieux-Château et d’entourer le plateau d’un ouvrage à couronne comportant quatre fronts bastionnés à flancs droits, demi-lunes, tenailles et traverses. Le village de Longwy-Bas doit également être entouré de remparts légers. Seules les réparations demandées sont réalisées, faute d’argent.
Longwy aux XVIIIe et XIXe siècles
La place de Longwy perd de son importance après la prise et l’annexion du Luxembourg en juin 1684. Un mémoire de 1688 prévoit même de la désarmer. Mais le Luxembourg est restitué en 1697 et Longwy retrouve alors son importance militaire. Plusieurs bâtiments, dont l’hôtel de ville, ne sont bâtis qu’au XVIIIe siècle et la ville n’en sera pas modifiée. Jusqu’à la guerre de 1870, le projet de Vauban ne subit que quelques modifications minimes, qui sont induites par les progrès de l’artillerie. Les principales créations sont la redoute à l’emplacement de l’ancien château médiéval et les lunettes qui prolongent les bastions de l’enceinte originelle. Intra-muros, la ville haute est dotée d’un nouvel hôpital et de nouvelles casernes. Du XVIIIe siècle au milieu du XIXe siècle, la vie militaire occulte quasiment toutes les autres activités économiques, à l’exception de la faïencerie. Au cours du troisième quart du XIXe siècle, Séré de Rivières améliore les magasins casematés en les enterrant. Dès les années 1850, la ville de Longwy connaît un fort développement industriel.
État actuel
Les deux tiers de l’enceinte, y compris la porte de France, existent encore. Longwy doit faire face à des bombardements successifs : en 1870-1871, puis en 1914. Après la Première Guerre mondiale, la ville haute est quasiment anéantie. Elle est progressivement reconstruite en préservant le parcellaire et la structure urbaine de Vauban. De l’enceinte subsiste aujourd’hui quatre bastions et deux demi-lunes, qui se répartissent en trois fronts. Des bâtiments militaires et civils subsistent la boulangerie, deux magasins à poudre, le puits de siège, l’église Saint-Dagobert et l’hôtel de ville. Son clocher observatoire a perdu un étage durant le siège prussien de 1870-1871. La ville a été déclassée en 1923. L’ensemble des fortifications est inscrit depuis 2008 au Patrimoine mondial au titre des fortifications de Vauban. Une maquette des fortifications de la ville est exposée au musée municipal. Longwy est la première ville neuve créée par Vauban parmi les dix qu’il réalise durant sa carrière.
Longwy
Longwy
49° 30' 52.403" N, 5° 46' 4.4695" E
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